Voici la lettre que je viens d’envoyer au Président de la République avec une dizaine d’autres députés concernés par la future réforme des Armées.
Nous avons également demandé à être reçu par Nicolas Sarkozy.
« Monsieur le Président de la République,
« Nous, parlementaires, membres de la majorité, venons vous alerter sur les conséquences des mesures contenues dans le Livre blanc sur la défense nationale. Si les suppressions de régiments et les abandons de garnisons annoncés venaient à être confirmés ces prochaines semaines et mis en œuvre d’ici la fin de nos mandats, nos territoires seraient lourdement et injustement impactés.
« La plupart de nos régiments emploient aujourd’hui plus d'un millier de militaires et de personnels civils. Si l'on ajoute à ce chiffre le nombre d'emplois indirects générés, leur suppression constituerait pour nos régions un drame sans commune mesure avec les restructurations industrielles qui ont émaillé l'actualité récente (Arcelor-Mittal à Gandrange, Kléber à Toul, Smoby en Franche Comté, etc.)
« Ces fermetures seraient d'autant plus difficilement explicables qu'elles trouveraient leurs origines dans des décisions venant d'un gouvernement que nous soutenons sans fléchir.
« Si nous adhérons de longue date à la nécessité de conduire la réforme historique de nos politiques publiques, nous estimons en revanche que certains territoires doivent sans doute être ménagés dans ce grand mouvement de rationalisation de la présence et de l’action publiques. Ainsi, à titre d’exemple, l’est de la France, premier touché par ce redéploiement des moyens de l’armée de terre, peut-il payer un si lourd tribut, ne serait-ce qu’au regard de l’effort historique qu’il dut consentir tout au long du 20ème siècle pour défendre le pays en première ligne ? De ce tissu d’implantations militaires est née une culture de l’enracinement territorial des armées, de leur participation à la vie économique, de leur poids démographique. Il en va de nos familles, de nos écoles, de nos commerces et de nos entreprises. Si la situation géopolitique a bel et bien évolué, doit-on pour autant opérer de tels sacrifices ?
« Nous nous interrogeons également sur les logiques économiques des regroupements actuellement à l’étude. Nous ne sommes pas convaincus que le regroupement de plusieurs régiments sur des lieux uniques sera générateur d'importantes économies, d'autant qu'il faudra sans nul doute réinvestir pour constituer ces nouveaux pôles militaires, et brader conjointement une part des équipements actuels pour lesquels nous avons déjà beaucoup investi…
« Dans cet esprit, nous en appelons à votre bon sens et à votre souci d'éviter la généralisation de drames humains et économiques à grande échelle. Si les informations publiées dans la presse se révélaient fondées, la restructuration de notre système de défense entraînerait des conséquences bien plus lourdes que certaines réformes nécessaires mais souvent douloureuses que le gouvernement a engagé, notamment celle de la carte judiciaire.
« Si, comme l’a rappelé votre Ministre de la Défense, l’armée n’a pas vocation à faire de l’aménagement du territoire, elle n’est pas davantage appelée à déserter, en temps de guerre comme en temps de paix.
« Nous vous remercions pour la suite que vous donnerez à cette démarche et vous prions de croire, Monsieur le Président de la République, en notre très haute considération ».