Je crapahutais dans le sud marocain, quand j’ai appris lundi la mort de dix soldats français en Afghanistan. L’un d’entre eux, Mélam Baouma, 23 ans, était marsouin de première classe au Régiment de Marche du Tchad. Il servait la mitrailleuse d’un VAB (véhicule de l’avant blindé) du régiment qui s’est renversé après l’accrochage avec les talibans. Quatre autres marsouins du RMT qui étaient dans le véhicule ont été blessés, dont un par balle.
J’ai aussitôt décidé de rentrer, et ce matin j’ai pu, avec le Préfet de l’Oise et le premier adjoint de Noyon, recevoir Jean-Marie Bockel, secrétaire d’Etat à la défense, venu témoigner aux militaires du régiment « la solidarité et la compassion du gouvernement et de la Nation ».
La cérémonie a été courte et pleine d’émotions. Les marsouins du RMT pleuraient leur copain tué et attendaient leurs blessés dont deux devaient rentrer ce matin.
Moi, en parcourant leurs visages tendus, je revoyais cette vallée de Surobi, perdue à 50 kilomètres à l’est de Kaboul, où j’avais, il y a tout juste quatre semaines, passé avec le ministre de la Défense une soirée et une nuit en compagnie des soldats qui ont été tués et de leurs camarades. Nous avions dîné de rations militaires, sous la tente, dans la poussière et la chaleur. Nous avions longuement parlé de leurs missions et des conditions difficiles qu’ils rencontraient sur le terrain. Je me rappelle du sérieux de ces hommes, de leur professionnalisme. Ils savaient être dans une zone particulièrement dangereuse où les talibans, pour la plupart infiltrés du Pakistan voisin, sont très actifs et déterminés.
En quittant le colonel, le lendemain à Kaboul, je me souviens lui avoir dit : « s’il vous plait, ramenez tous nos marsouins à Noyon !». Je ne pouvais pas savoir que Mélam ne reverrait jamais le sol de l’Oise. Ainsi va la dure loi des armes.